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Table des matières
Note préalable
Cette analyse est pour l’heure limitée à l’analyse étymologique et doit encore inclure les différents exemples tirés de l’analyse mythologique comparative, des déclinaisons mythologiques civilisationnelles des deux symboles étudiés.
Notez aussi que cette analyse est reprise dans le livre 1 du volume 2 « le déchiffrage du langage des cavernes », auroch et bison étant des figures majeures de l’art sacré pariétal.
Analyse étymologique (sumérien, égyptien hiéroglyphique et démotique)
En Sumérien
En sumérien, il y a deux mots pour dire cerf : lulim[1] et a-ia10-lum[2].
Intéressons-nous à Lulim qui est pour l’heure suffisant.
Lulim peut se décomposer en lu-lim[3].
Lu
Comme j’ai déjà eu l’occasion de le mentionner (cf. analyse de l’auroch alim), lu désigne en sumérien un homme, des humains ou un troupeau[4] ; lú désigne un homme adulte[5] ; lú-u18 désigne un être humain et l’humanité en général[6].
Nous avions aussi noté que ce logogramme est un exemple de la récurrente constante association de l’homme à l’animal par lu ou lú-u-um18 [7].
Nous avons aussi vu que lugal [8], littéralement « l’homme grand », signifie « un roi, un maître »[9]
Lim
Nous avons déjà vu le sens de ce logogramme lim dans l’examen de l’auroch, du bison, du taureau sauvage alim.
Nous avons vu que lim signifie par :
- li-im ou lu-im exprime l’idée d’un homme adulte au corps fait d’argile, de boue, que l’on peut associer à un animal, dont le corps est rayonnant de splendeur comme une divinité et qui est un père.
- lim comme équivalent de lum fait référence à un mâle complet, en bonne santé, fertile, mais aussi de l’engrais, du fumier faisant croître de manière luxuriante, à un géniteur reproducteur.
- lim par son équivalence avec lam, désigne un être divin doté d’une abondance de pouvoir, source d’abondance et régnant sur le monde souterrain, les enfers.
Conclusion sur le sens sumérien de lulim
Ces doubles sens mis bout à bout nous permettent de saisir l’imagerie du symbole du cerf qui dépasse évidemment de très loin le simple animal (chassé), mais qu’il est une figure mythologique, un avatar de l’homme primordial tiré de l’argile, un homme complet, en bonne santé, qui a sa mort est devenu du fumier et a été déifié en tant que père des dieux régnant sur les enfers et source de l’abondance sur la terre.
Ce cerf, lulim sert à masquer au profane son identité de « lu » un homme, un humain. L’humain primordial, tout comme alim, l’auroch sert à masquer « a » le « père » primordial.
Sur le fait que lu serve à représenter le cerf, je trouve intéressant de noter ce que dit le dictionnaire des symboles à son sujet savoir qu’en Chine « on trouve aussi mention d’un symbole de longévité, mais surtout de prospérité, fondé sur les habituels calembours populaires, car lou signifie à la fois cerf et émoluments[10]. (CHEVALIER-GHEEBRANT, Dictionnaire des Symboles, 2005, p. 197).
Que le cerf se dise lou en chinois (et aussi signifie émoluments alors que, nous le verrons la notion de « salaires » est attaché au père) qui est une langue comme nous l’avons vu, qui par certains aspects a été de toute évidence imprégnée par la pensée archaïque sumérienne, est assez symptomatique.
En Égyptien hiéroglyphique
En confirmation du fait que le cerf représente en fait un homme, en l’occurrence, l’homme primordial, il est aussi très intéressant de se tourner vers le système sémiologique consanguin du sumérien, celui des hiéroglyphes.
En effet, dans le livre 2 du volume 2 intitulé « De Dieu à Adam » il est démontré, par bien des axes étymologiques concordants, que le couple sumérien lu ou lú / lú-u18 a la même équivalence de sens que le couple égyptien Hn / Hnmmt.
On peut simplement se limiter à dire ici, pour l’instant, que l’égyptien hiéroglyphique Hnmmt [11] signifie « l’humanité ».
Rien que cela permet en effet de déduire que son logogramme racine Hn signifie l’humain (avec au premier chef d’entre eux, le premier humain, le père primordial).
En effet, la particule mmt finale confère un caractère de substantif au logogramme qui le précède.
Par exemple : nDm est quelque chose de doux, plaisant[12] et nDmmt est le plaisir sexuel[13] ; Sm signifie avoir de la fièvre[14] et Smmt désigne la fièvre[15].
Hn désigne donc l’humain.
Et, comme j’aurais aussi l’occasion de le démontrer, Hn et hn sont des logogrammes équivalents en égyptien.
Or, comment se dit cerf en égyptien hiéroglyphique ?
hnn [16]…
En Démotique :
Si l’on se tourne vers le démotique, on observe la même association, même si indirecte, entre lu et le père.
En effet, le démotique lala qui signifie pleurer, se lamenter (ang. to wail)… [17] :
.., est associé à llul qui signifie un cri (ang. shout) [18]
Or, en sumérien, cri est synonyme de père par “ad(a)[19]” et el/al voire la signifient indifféremment « père élevé » par la contraction de « a » ou « e4 »[20] et de « íla, íli, íl » « être élevé »[21].
Le volume 2 montre pourquoi cris et lamentations ont été associés au père primordial, mais cette simple équivalence sémantique entre le démotique la / lul avec le sumérien a / al / la / lu renvoyant au père divinisé est très parlante.
Conclusion de l’analyse étymologique (sumérien, égyptien hiéroglyphique et démotique)
Cette brève analyse étymologique du cerf par le sumérien lu l’égyptien hiéroglyphique hnn et le démotique lala/llul nous a permis de comprendre que le cerf est bien un avatar de l’homme primordial.
Le décrivant comme un homme complet, en bonne santé, tiré de l’argile, qui a sa mort est devenu du fumier et a été déifié en tant que père des dieux régnant sur les enfers en étant considéré comme la source de l’abondance sur la terre.
Notes de bas de page :
[1] lulim : stag, hart (male of the red deer; cf., máš-lulim) (Akkadian loanword) (A.Halloran, 1999, p. 62) ; Volume 4 / Lexique sumérien-français : lulim = cerf (mâle de la famille des cerfs commun ; voir máš-lulim) (emprunt akkadien).
[2] a-ia10-lum : stag (Akkadian loanword) (A.Halloran, 1999, p. 72) ; Volume 4 / Lexique sumérien-français : a-ia10-lum : cerf (emprunt Akkadien)
[3] Notez que dans le lexique Halloran il nous est dit par ailleurs que lulim est la contraction de « pâturer » (lu) et de « milliers » (lim) : lu-lim : stag (Akkadian loanword ?; ‘to graze, pasture’ + ‘thousand’) (A.Halloran, 1999, p. 115) ; Volume 4 / Lexique sumérien-français : lu-lim : cerf (emprunt Akkadien ? ; « paître, pâturer » + « milliers »).
C’est peut-être là son sens littéral mais lu et lim n’ont pas que ces sens…
[4] lu : n., many, much; man, men, people; sheep. v., to be/make numerous, abundant; to multiply; to mix; to graze, pasture (reduplication class [?]) (cf., lug) (A.Halloran, 1999, p. 12) ; Volume 4 / Lexique sumérien-français : lu = beaucoup ; homme, humains, gens, peuple ; troupeau. Verbes : être rendre nombreux, abondant ; multiplier ; mélanger ; faire pâturer.
[5] lú : grown man; male; human being; someone, anyone, no one; gentleman (A.Halloran, 1999, p. 12) Volume 4 / Lexique sumérien-français : lú = homme adulte ; mâle ; être humain ; quelqu’un, n’importe qui, personne ; gentleman.
[6] lú-u18[ÑIŠGAL]– (lu) : mankind; human being (‘humans’ + ‘huge’ [ + ‘numerous’]) (A.Halloran, 1999, p. 117) ; Cf Volume 4 / Lexique sumérien français : lú-u18[ÑIŠGAL]-(lu) = humanité ; être humain (humains + énorme + nombreux)
[7] lú-u-um18 : name of a breed of small cattle (possible Semitic loanword) (A.Halloran, 1999, p. 117) ; Cf Volume 4 / Lexique sumérien français : lú-u-um18 : nom d’une race de petit bétail (possible emprunt sémitique).
[8] (CNIL, 1996?, p. 128)
[9] lugal : king; owner, master (lú, ‘man’, + gal, ‘big’) (A.Halloran, 1999, p. 62) ; Volume 4 / Lexique sumérien-français : lugal : roi ; propriétaire, maître (lú, homme + gal, grand)
[10] Les livres du volume 2 démontrent que tout comme la notion de part, portion, la notion de salaires (émoluments) est attachée au père.
[11] Cf Volume 4 / Lexique hiéroglyphes-français : Hnmmt peuple solaire d’Héliopolis; humanité (Faulkner, réed.2017, p. 213)
[12] Cf Volume 4 / Lexique hiéroglyphes-français : nDm doux, sucré; plaisant; sain; à l’aise (Faulkner, réed.2017, p. 179)
[13] Cf Volume 4 / Lexique hiéroglyphes-français : nDmmyt nDmmt plaisir sexuel, passion (charnelle)
[14] Cf Volume 4 / Lexique hiéroglyphes-français : Smm être chaud, brûlant ; avoir de la fièvre, devenir fiévreux ; aussi Sm (Faulkner, réed.2017, p. 326)
[15] Cf Volume 4 / Lexique hiéroglyphes-français : Smmt fièvre; inflammation (Faulkner, réed.2017, p. 326)
[16] Cf Volume 4 / Lexique hiéroglyphes-français : hnn cerf, daim être attentif à, prendre en considération; faire confiance à; donner son assentiment à; approuver; amadouer ; antonyme de HDn être réticent, désapprouver (néo-égyptien) (Faulkner, réed.2017, p. 196)
[17]https://oi.uchicago.edu/research/publications/demotic-dictionary-oriental-institute-university-chicago / L, p.3
[18]https://oi.uchicago.edu/research/publications/demotic-dictionary-oriental-institute-university-chicago / L, p.12
[19] ada, ad : n., father; shout; song. v., to balk. (A.Halloran, 1999, p. 18) ; Volume 4 / Lexique sumérien-français = ada, ad = nominatif : père, cri, chant / verbe : rechigner
[20] a, e4 = nom. : water; watercourse, canal; seminal fluid; offspring; father; tears; flood (A.Halloran, 1999, p. 3) avec traduction au Volume 4 / Lexique sumérien-français : a, e4 = au nominatif = eau, cours d’eau, canal, fluide séminal, descendance, père, larmes, inondation ou déluge.
[21] íl-lá: elevation (‘to lift’ + ‘to hang’; cf., dùn-lá, ‘depression’) (A.Halloran, 1999, p. 105) ; Volume 4 Lexique sumérien-français : íl-lá = élévation (« lever » + « suspendre »).
íla, íli, íl: n., carrier.., to lift, carry; to deliver; to bring; to endure; to support; to carry forward (in accounting); to be high; to shine (íl-i in marû) (A.Halloran, 1999, p. 105) ; Volume 4 Lexique sumérien-français : íla, íli, íl = nominatif : transporteur ; verbe : lever, porter, livrer, amener, endurer, supporter, reporter ; être élevé ; briller (íl-i à marû)
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©YVAR BREGEANT, Avril 2023 Tous droits réservés
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